Et si on sortait fêter l’été, la nuit la plus courte de l’année
En allant vers le Castillet où se presse déjà la foule des grands jours, je me dis qu’ici à Perpignan, c’est la Saint-Jean, ailleurs c’est le solstice d’été, un moment clé pendant l’année où le jour est plus fort que la nuit, où le mouvement, l’envie de renouveau balaie le poids du passé. Pour cela, il faut faire de la place et se débarrasser des vieux oripeaux qui collent à la peau, comme une volonté de se purifier par le feu, un feu joyeux comme la promesse d’un été ensoleillé.
Dans les Pyrénées-Orientales, cette tradition antique a été réinterprétée par un groupe de jeunes catalans qui dans les années 1950, rêvaient de liberté et fraternité, autour du Canigó célébré par Jacint Verdaguer, un prêtre catalan ayant gravi la montagne en soutane et chaussures vernies.
Allumez le feu
Le Canigó, devenu symbole d’identité, la solidarité et la fraternité vont peu à peu s’imposer comme valeurs de cette nuit d’été. L’idée de feux de joie comme autant de lueurs dans la nuit (l’Espagne était alors une dictature) va prendre forme et une petite flamme permanente sera gardée toute l’année au musée de la Casa Pairal au Castillet pour rallumer le feu du Canigó. Chaque village fera porter un fagot de bois pour alimenter le grand bûcher du sommet, visible depuis les plaines du Roussillon et de l’Ampurdan. Dès lors, tout devient motif à rencontres, à échanges, à « trobada ». Le matin du 23 juin, la flamme symbole de fraternité et de trait d’union entre les peuples de langue catalane, est accueillie en fanfare à son arrivée par porteur, à bord de différents moyens de transport, de la barque au vélo, de l’avion à la moto.
Une vague de chaleur
En ville la fièvre monte, les terrasses de café se remplissent et un air de fête flotte en cette fin d’après-midi. Une déambulation de joueurs de cornemuses a donné le la, et l’on goûte au plaisir de l’attente. La foule se presse déjà pour assister à l’arrivée de la cavalcade tandis que sur scène, les espadrilles des danseurs folkloriques claquent en rythme, les géants pavoisent lentement, un talentueux ténor charme l’assistance et une chanteuse originaire du bout du monde interprète une chanson du regretté Jordi Barre, fidèle de la Festa Major. Les bouquets porte-bonheur composés d’une feuille de noyer, d’immortelle, de millepertuis et d’orpin et sertis d’un ruban aux couleurs catalanes, sont distribués avec soin et l’on se partage la « coca » (brioche) de Saint Jean.
Lorsqu’arrivent les coureurs porteurs de la flamme comme autant de messagers de paix, le Maire allume la vasque et les grimpeurs, mûs par le désir de se surpasser, escaladent la façade du Castillet pour porter la flamme et le drapeau (senyera) au plus haut. Sur les murs de briques rouges, un « mapping » rend un hommage onirique et brillamment imagé au Canigó. Le long de la Basse, les arbres et les quais semblent s’illuminer, tandis que le sommet du Castillet s’embrase soudain avec des coulées de feu qui dévalent le long de la façade. Un spectacle ébouriffant.
Au carrefour, un feu de joie sécurisé consume vieux meubles et objets dont on veut se débarrasser, les étincelles s’élèvent vers la nuit la plus courte de l’été, et on adresse une pensée émue à tous ceux qui, à leur façon, ont fêté ce solstice d’été, dans les villages des Pyrénées-Orientales.
Créé par l ADT des Pyrénées-Orientales ⋅ Copyright 2016 - 2022
Nous utilisons des cookies pour vous garantir la meilleure expérience sur notre site. Merci de bien vouloir accepter ou refuser les cookies en cliquant sur le bouton correspondant.J'accepte les cookiesPolitique de confidentialité
Ajouter un commentaire