Echanges et émotions partagées pour un moment d’exception…
Lève-tôt dans la nuit noire
Il fait encore nuit lorsque je rejoins le groupe de lève-tôt venus assister à une lecture de textes au camp de Rivesaltes. Je me dis que la nuit n’est jamais aussi noire qu’avant l’aube. Je me retrouve vite plongée dans l’atmosphère et j’imagine sans peine l’arrivée les pas des nouveaux internés, perclus de fatigue, rongés d’angoisse et d’incertitude, dénués de tout et même d’espoir, s’acheminant d’un pas pesant vers l’inconnu.
Pour l’heure, nous suivons en silence les personnes venues nous chercher. De petites loupiotes à même le sol de la garrigue odorante guident nos pas assurés de curieux et de passionnés d’histoire. Happés par la solennité du moment, nous nous installons en silence.
Lectures dédiées
La gorge serrée, Agnès Sajaloli, directrice du Mémorial va dédier cette lecture à son père. A ses côtés, la musicienne Marie Grollier cale son violoncelle. La lecture comme et toujours le silence. Les premiers mots sont égrenés tandis que résonnent des notes de musique tout en gravité, une improvisation sur de la musique Kletzmer, nous expliquera plus tard, Marie.
Une lecture assurée par Agnès Sajaloli et mise en musique par Marie Grollier, violoncelliste.
Des extraits de témoignages de personnes internées ou hébergées au camp de Rivesaltes.
Le premier texte est un témoignage d’un réfugié républicain espagnol qui raconte sa sidération d’être captif, lui qui n’a rien fait, qui est juste un vaincu. Suit le témoignage d’une famille d’Ashkénazes après les rafles de 1942, fuyant une traque qui s’achèvera tragiquement, et puis un texte sur l’arrivée des Harkis, après la guerre d’Algérie, hagards, épuisés et mis au ban de la société, eux qui avaient manifesté leur fidélité. Vient ensuite le bouleversant témoignage d’un Ivoirien, victime des séismes et crises politiques des années 60 et enfin, la quête éperdue d’un groupe de syriens, traversant le marasme dans lequel est plongé leur pays et en proie à tous les prédateurs, debout à l’affût.
Duettistes de la mémoire
Cette litanie de tous les exils lue avec émotion et précaution provoque des larmes qui s’écoulent sans bruit tandis que montent vers le ciel qui s’éclaire, les dernières notes de musique. La lectrice et la musicienne se regardent souvent, plongées qu’elles sont dans cet exercice de duettistes de la mémoire. Le public saisi, ne sait s’il doit se taire ou remercier puis il applaudit doucement, de peur de briser cette fragile alchimie.
Le soleil s’est enfin levé. Après cette expérience d’exception, les appétits se sont creusés et tout le monde a dégusté un petit déjeuner riche d’échanges et d’émotions partagées.
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